4/12: Colloque participatif : Du logement solidaire à l’habitat solidaire
Notre constat de départ sur Bruxelles (mais pas que), est que l’habitat solidaire s’est « réduit » à du logement « solidaire » voire parfois – a minima – à du logement communautaire. Il ne s’agit nullement de dénigrer les formes actuelles de « logement solidaire », mais de s’interroger sur ce qui fait ou devrait faire sens lorsqu’on choisit d’habiter « autrement », de vivre en habitat solidaire.
Ce logement solidaire n’est pas condamnable en tant que tel, il répond à une valeur de « confort partagé » au vu de la limitation des espaces disponibles et/ou du prix d’accès au logement. Ce confort partagé articule ainsi espaces individuels réduits et espaces collectifs partagés. C’est déjà beaucoup ! Mais allons un pas plus loin …
Le mot « logement » a – à la base – une portée nettement plus réduite que le terme « habitat ». Le mot « logement » provient du grec « logos » qui donnera le mot « logium » (loge), c’est-à-dire un lieu de promenade au sein de la maison, espace où les anciens pouvaient s’entretenir de leurs affaires. Le terme de « logement » est attesté dès 1275 avec une acception fort réduite : il s’agit d’un local réquisitionné chez l’habitant par l’autorité militaire qui souhaite y « loger » des troupes de passage. Les termes de « promenade » et de « passage » montrent bien que ce lieu n’est pas destiné – au départ – pour une résidence prolongée dans le temps.
Alors, que signifierait passer du « logement solidaire » à « l’habitat solidaire » ?
Primo, si on revient aux fondamentaux de ceux qui – à Habitat et Participation – ont réalisé en 1984 les premiers écrits sur le sujet, on constatera qu’on a éradiqué une partie du concept et ce depuis de nombreuses années. D’une part, lorsque l’on parle d’habitat solidaire, il faut se souvenir que le terme de base est « habitat groupé solidaire ». Ensuite, si l’on en croit les pères fondateurs, il faudrait même parler d’habitat groupé auto-géré solidaire. Ce terme d’auto-géré donne une dimension toute nouvelle aux « habitats solidaires » le plus souvent mis en place. Il renvoie d’ailleurs à l’appellation française d’habitat participatif, sachant que la participation entre en dialogue avec la démocratie et le politique. Les personnes qui résident dans ce type d’habitat devraient donc idéalement mettre en place des formes d’auto-gestion de leur collectif d’abord, de leur environnement ensuite. En filigrane, l’idée est de permettre à chacun de reprendre du pouvoir sur sa vie et son environnement (sur sa ville).
Secundo, le terme d’habitat a un sens bien différent du terme de logement. Le terme d’habitus existe en latin médiéval. Il est créé à partir du verbe « habere » (avoir). On trouve le terme d’habitat dès 1808 dans des traités de zoologie et de botanique pour désigner le territoire occupé par une plante à l’état naturel. Au XXe siècle, on commence à utiliser ce terme pour l’homme : il s’agit du milieu dans lequel l’homme évolue. Un sérieux glissement s’est opéré au niveau du sens grâce à Henri Lefebvre (1901-1999) qui lance les prémices de la sociologie urbaine et estime que ce terme d’habitat a pleinement à voir avec l’être. Ainsi, le terme d’habitat prend un sens extrêmement fort puisqu’il représente cet « avoir » (origine étymologique du verbe habere) qui fonde l’être. Nous nous sommes bien éloignés de cet espace de promenade ou de passage que sous-tend le mot « logement ».
Tertio, nous devons bien ici nous intéresser au second terme de la formule : il ne s’agit pas de n’importe quel habitat, mais d’un habitat dit « solidaire ». C’est un habitat qui doit permettre-créer des liens « solides ». Mais il faut se garder de franchir trop vite le pas. Un habitat solidaire est un objectif à atteindre, pas une réalité décrétale. En effet, tout comme la participation citoyenne, la solidarité ne peut se décréter au sein d’aucun habitat, aussi groupé soit-il. Et n’oublions pas que le terme de solidarité n’est pas aussi inoffensif qu’il n’y paraît : créer de la solidarité, c’est créer du lien ; créer du lien, c’est construire du collectif et construire du collectif a une dimension éminemment subversive car le collectif est aussi une forme de contre-pouvoir.
En savoir plus et participer à notre colloque :
Date : le 4 décembre 2018
Lieu : Centre Communautaire Maritime, Rue Vandenboogaerde, 93 à 1080 Molenbeek Saint Jean (métro Ribaucourt / Bus 89,14,13)
Coût : 5€
Inscription obligatoire : ici
Programme:
9H30 – accueil – Introduction
10H00 Quels sont les questionnements rencontrés au sein des “habitats solidaires – intergénérationnels” actuels qui souhaitent mettre en place de la solidarité entre les habitants ? (travaux en sous-groupes)
11H00 Pause
11H15 Exposé sur le passage du logement solidaire à l’habitat solidaire – quelles solidarités voulons-nous ? En quoi cela interroge-t-il la relation au quartier de ces habitats ? En quoi un modèle d’habitat solidaire a pour ambition de redonner aux habitants du pouvoir sur leur vie et sur leur ville ? (D. Mignolet et P. Thys – Habitat et Participation)
12H15 Exposé-témoignage d’un porteur de projet
12H45 Pause de midi et repas
13H45 Travaux en sous-groupes pour concrétiser des pistes de travail – présence de porteurs de projets pour faciliter la réflexion.
15H00 Mise en commun des résultats
15H30 Verre de l’amitié